Juste une belle journée

Cérémonie des Justes : dimanche 22 septembre 2024

Photo Danny Joseph, le frère de Paul, avec l’appareil photo Zeiss Ikon Contax de 1938 de leur père Frans, sauvée par leurs voisins et restituée à leur retour après-guerre.

Dimanche 22 septembre près de cent cinquante personnes étaient venues au cimetière de Ney accueillies par « Une nuit sans étoile », chanson écrite et composée spécialement pour l’occasion par Rafaël Arias, chef de cœur des Voix amies.

Gérard Panczer, entouré des maire et maire-adjoint

Le Maire Gilles Grandvuinet prononçait son discours de bienvenue, suivi par M. Panczer, du Comité français pour Yad Vashem, dont le nom est tiré d’un texte d’un verset du prophète Isaïe «  Et je leur donnerai dans ma maison et dans mes murs un mémorial (Yad) et un nom (Shem) qui ne seront jamais effacés ».

Cette organisation œuvre à la reconnaissance des Justes parmi les Nations, distinction accordée à des non-juifs qui, au péril de leur vie ou celle de leurs proches, ont sauvé des juifs persécutés par l’occupant nazi. Plus de 28000 justes sont recensés dans le monde, dont 4000 en France et aujourd’hui 20 dans le Jura avec Jules et Reine Delidais.

L’acte héroïque de ce couple de calins a été révélé il y a huit ans par Paul Joseph, témoin vivant et bien présent ce dimanche, qui retraça le quotidien de sa famille, hébergée et cachée pendant trois semaines en 1943 puis accompagnée par Jules durant 3 jours jusqu’en suisse où elle fut définitivement sauvée. Il exposa les motifs de son initiative : remercier les descendants de passeurs et résistants, ce que son père n’avait pas fait, et transmettre l’histoire à sa famille et au monde.

Paul Josep, enfant sauvé en 1943 par Jules et Reine Delidais, de retour à Ney

Rafaël Arias clôtura ce premier tiers de cérémonie par un arrangement personnel mélodieux associant Hatikvah et Marseillaise, soufflées dans son cor et montant vers le Bénédegand pour atteindre l’âme des vivants et des morts.

Le deuxième tiers se poursuivait à côté de l’église, devant la maison habitée par les Delidais pendant la guerre, inauguré par un deuxième chant, « on écrit sur les murs ». Une analogie aussitôt reprise par le maître de cérémonie, Patrice Anthonioz, 1er adjoint, pour mettre en perspective plusieurs gravures du nom des Delidais dans trois endroits distincts : le mur d’honneur du Jardin des Justes à Jérusalem, le mur de l’Allée des Justes parmi les Nations à Paris près du mémorial de la Shoa, et le mur de la maison de Marie-Noëlle et Pascal Cattenoz, propriétaires actuels du lieu où ont été cachés les Joseph. Ils dirent leur enthousiasme à accueillir cette plaque-mémoire, frappée du sceau de la Commune arborant Saint Martin son patron, partageant son manteau avec un démuni, comme un signe prémonitoire de ce qui se passerait ici des années plus tard. Michèle Montolivo-Marseille, petite-fille des Delidais, dévoila cette inscription.

La foule se déplaça ensuite de quelques mètres vers l’aire de jeu nouvellement créée. Le maire de Ney exposa le choix du Conseil Municipal d’accepter la proposition de son adjoint en vue de la baptiser « Square Jules et Reine Delidais ». Il s’agit de transmettre aux jeunes générations fréquentées par ce lieu, l’histoire du village et de ces personnes modestes devenues grandes par leurs actes héroïques, en face d’une barbarie sans nom qu’il convient de ne pas reproduire. Sept enfants de l’école Cize-Ney ont lu des textes sur le thème des enfants cachés. Une plaque commémorative fut dévoilée conjointement par Michèle, descendante de la famille des sauveurs et Paul, sauvé avec ses parents en 1943 tandis que la chorale interprétait « un monde meilleur ». Chacune des gravures comprend un QR code lié à une page dédiée sur le site de la commune.

La partie finale se déroula dans la salle du Briska. Marie Christine Dalloz s’exprima au nom des trois parlementaires présents dont Clément Pernot, sénateur, et Eloïse Schneider, Conseillère Départementale, pour insister sur le rôle essentiel de telles manifestations dans le monde agité d’aujourd’hui. On écouta ensuite l’allocution de Mme Osnat Menache, Directrice du Département de Diplomatie Publique de l’Ambassade d’Israël à Paris, laquelle remit la médaille des justes et le diplôme d’honneur à Michèle Montolivo-Marseille, son mari Jean-Marc, ses fils Julian et Aymeric, avec les commentaires de Mme Altar et M. Panczer de Yad Vashem. Michèle, qui sentait monter depuis plusieurs jours l’effervescence d’un bonheur annoncé, prononça un mot de gratitude rempli d’une émotion palpable par toute une salle, dont la Sous-préfète, Mme Sevenier-Muller qui intervenait en dernier ressort au nom de l’Etat et qui dût auparavant sécher ses paupières. A l’issue, Hatikvah, l’hymne national d’Israël puis la Marseillaise, étaient chantées par les voix amies accompagnées par Elsa Anthonioz au piano. L’assemblée se remettait ensuite de ces émotions intenses autour d’un apéritif convivial, en communion avec les familles Joseph et Delidais.

 

Dans l’après-midi, le public revint pour visionner un film produit par Paul Joseph, retraçant l’épopée de sa famille depuis la Hollande jusqu’à la suisse et incluant l’un des épisodes cruciaux de cette fuite, le Jura et ce petit village de Ney qui eut ses héros, actifs comme Jules et Reine, ou admirablement discrets parmi ceux qui avaient remarqué des mouvements de personnes inconnues autour de la ferme Delidais et qui ne les avaient pas trahis.

« J’ai fait connaissance avec Paul Joseph en mars 2017, je me suis passionné pour cette histoire et lorsqu’il m’a dit son intention de soumettre un dossier de reconnaissance à Yad Vashem, je me suis investi à fond. Nous avons retrouvé Michèle, la petite-fille des Delidais. J’ai lié une amitié sincère avec Paul et Carry sa femme. Aujourd’hui j’ai une nouvelle amie, Michèle. Nous avons établi des liens forts entre leurs familles et la Commune de Ney, au travers d’émotions fortes durant ce week-end de septembre 2024, qui resteront à jamais gravées dans nos mémoires. J’ai un plaisir immense d’avoir contribué à rendre autant de gens heureux, et confiants sur la capacité des hommes à vivre ensemble, quelques soit leur nationalité, leur origine ou leur religion. »
Patrice Anthonioz
Maire-Adjoint

Replay : France 3 BFC

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