Cérémonie des Justes : dimanche 22 septembre 2024
Dimanche 22 septembre près de cent cinquante personnes étaient venues au cimetière de Ney accueillies par « Une nuit sans étoile », chanson écrite et composée spécialement pour l’occasion par Rafaël Arias, chef de cœur des Voix amies.
Le Maire Gilles Grandvuinet prononçait son discours de bienvenue, suivi par M. Panczer, du Comité français pour Yad Vashem, dont le nom est tiré d’un texte d’un verset du prophète Isaïe « Et je leur donnerai dans ma maison et dans mes murs un mémorial (Yad) et un nom (Shem) qui ne seront jamais effacés ».
Cette organisation œuvre à la reconnaissance des Justes parmi les Nations, distinction accordée à des non-juifs qui, au péril de leur vie ou celle de leurs proches, ont sauvé des juifs persécutés par l’occupant nazi. Plus de 28000 justes sont recensés dans le monde, dont 4000 en France et aujourd’hui 20 dans le Jura avec Jules et Reine Delidais.
L’acte héroïque de ce couple de calins a été révélé il y a huit ans par Paul Joseph, témoin vivant et bien présent ce dimanche, qui retraça le quotidien de sa famille, hébergée et cachée pendant trois semaines en 1943 puis accompagnée par Jules durant 3 jours jusqu’en suisse où elle fut définitivement sauvée. Il exposa les motifs de son initiative : remercier les descendants de passeurs et résistants, ce que son père n’avait pas fait, et transmettre l’histoire à sa famille et au monde.
Le deuxième tiers se poursuivait à côté de l’église, devant la maison habitée par les Delidais pendant la guerre, inauguré par un deuxième chant, « on écrit sur les murs ». Une analogie aussitôt reprise par le maître de cérémonie, Patrice Anthonioz, 1er adjoint, pour mettre en perspective plusieurs gravures du nom des Delidais dans trois endroits distincts : le mur d’honneur du Jardin des Justes à Jérusalem, le mur de l’Allée des Justes parmi les Nations à Paris près du mémorial de la Shoa, et le mur de la maison de Marie-Noëlle et Pascal Cattenoz, propriétaires actuels du lieu où ont été cachés les Joseph. Ils dirent leur enthousiasme à accueillir cette plaque-mémoire, frappée du sceau de la Commune arborant Saint Martin son patron, partageant son manteau avec un démuni, comme un signe prémonitoire de ce qui se passerait ici des années plus tard. Michèle Montolivo-Marseille, petite-fille des Delidais, dévoila cette inscription.
La foule se déplaça ensuite de quelques mètres vers l’aire de jeu nouvellement créée. Le maire de Ney exposa le choix du Conseil Municipal d’accepter la proposition de son adjoint en vue de la baptiser « Square Jules et Reine Delidais ». Il s’agit de transmettre aux jeunes générations fréquentées par ce lieu, l’histoire du village et de ces personnes modestes devenues grandes par leurs actes héroïques, en face d’une barbarie sans nom qu’il convient de ne pas reproduire. Sept enfants de l’école Cize-Ney ont lu des textes sur le thème des enfants cachés. Une plaque commémorative fut dévoilée conjointement par Michèle, descendante de la famille des sauveurs et Paul, sauvé avec ses parents en 1943 tandis que la chorale interprétait « un monde meilleur ». Chacune des gravures comprend un QR code lié à une page dédiée sur le site de la commune.
La partie finale se déroula dans la salle du Briska. Marie Christine Dalloz s’exprima au nom des trois parlementaires présents dont Clément Pernot, sénateur, et Eloïse Schneider, Conseillère Départementale, pour insister sur le rôle essentiel de telles manifestations dans le monde agité d’aujourd’hui. On écouta ensuite l’allocution de Mme Osnat Menache, Directrice du Département de Diplomatie Publique de l’Ambassade d’Israël à Paris, laquelle remit la médaille des justes et le diplôme d’honneur à Michèle Montolivo-Marseille, son mari Jean-Marc, ses fils Julian et Aymeric, avec les commentaires de Mme Altar et M. Panczer de Yad Vashem. Michèle, qui sentait monter depuis plusieurs jours l’effervescence d’un bonheur annoncé, prononça un mot de gratitude rempli d’une émotion palpable par toute une salle, dont la Sous-préfète, Mme Sevenier-Muller qui intervenait en dernier ressort au nom de l’Etat et qui dût auparavant sécher ses paupières. A l’issue, Hatikvah, l’hymne national d’Israël puis la Marseillaise, étaient chantées par les voix amies accompagnées par Elsa Anthonioz au piano. L’assemblée se remettait ensuite de ces émotions intenses autour d’un apéritif convivial, en communion avec les familles Joseph et Delidais.
Dans l’après-midi, le public revint pour visionner un film produit par Paul Joseph, retraçant l’épopée de sa famille depuis la Hollande jusqu’à la suisse et incluant l’un des épisodes cruciaux de cette fuite, le Jura et ce petit village de Ney qui eut ses héros, actifs comme Jules et Reine, ou admirablement discrets parmi ceux qui avaient remarqué des mouvements de personnes inconnues autour de la ferme Delidais et qui ne les avaient pas trahis.